Les journalistes ont les yeux braqués sur le CES 2016 de Las Vegas. Or comme on dit: « quand le sage montre la Lune, l’idiot regarde le doigt »…
Car qui peut, parmi les nombreuses startups oeuvrant dans l’impression 3D, se payer un stand à 70000$ minimum? Les stands les plus en vue (les plus gros, les mieux placés, etc.) sont loués plus d’un million de dollars… Il faut donc soit prendre un risque considérable et présenter un produit révolutionnaire qui va faire le « buzz » dans les media, soit présenter une nouvelle gamme, bien sage, sans risque et considérer le salon comme une campagne de pub à l’impact mondial et finalement bon marché.
Ainsi nous y retrouverons les plus gros, pour qui le CES est absolument incontournable. 3DSystem, par exemple, y présentait ses imprimantes mammouths à 500 000 dollars pièce.
XYZprinting, sous-marque de l’énorme New Kinpo Group, présente de « nouveaux » modèles de da Vinci mais bien malin qui pourra dire ce que ces machines ont de réellement nouveau. De la même façon, Formlabs y présente à « Form 2 », une évolution mineure de son excellente machine SLA.
D’autres marques, à la communication bien rodée, profiteront de l’évènement pour faire part de leurs innovations en dehors du CES. C’est très malin. Ainsi Ultimaker évoquera une évolution de ses deux machines vedettes. Des améliorations bien venues mais somme toute assez dérisoires.
TierTime présentera le successeur de la très bonne Up mini, appelée… Up mini 2 qui apporte des améliorations très intéressantes comme la calibration automatique d’un plateau prétendument révolutionnaire qui assure une adhésion renforcée des objets imprimés ainsi que leur décollement facilité en fin d’impression. Je reste dubitatif sur les performances annoncées mais j’attends de tester cette adorable machine avant de dégainer quelques commentaires dithyrambiques ou trop critiques. La machine dispose en outre d’un filtre HEPA, c’est à dire une « chose » totalement inutile mais qui préfigure probablement ce que nos politocards de compétition ne vont pas tarder à imposer à la profession. Un filtre inutile, coûteux qui, en outre, rassure à tort l’utilisateur de la machine. Filtre ou pas, ventilez!
Maizalors, où sont donc les vraies nouveautés, les innovations?
Comme je l’ai toujours soutenu -et les faits me donnent raison- les innovations viennent de la base, des innombrables startups qui se créent, se financent à coups de tours de table et nous présentent des machines surprenantes, pas toujours parfaitement fonctionnelles mais terriblement séduisantes. Ce qui change en 2016, c’est que ces startups arrivent sur le marché avec des imprimantes 3D qui n’ont rien à envier à celles des ténors du domaine.
Pegasus, par exemple, expose une imprimante SLA, sur le papier, supérieure à tout point de vue à celle de formlabs. Rien ne semble oublié, on y trouve même un connecteur Ethernet sans oublier bien évidemment WIFI et USB.
La Stratomaker, une imprimante 3D FDM, une machine française s’il vous plait, remarquablement bien pensée, très précise (jusqu’à 20 microns), carénée, offrant un important volume d’impression (225 x 205 x 220 mm), avec wifi et connecteur de carte SD, un extrudeur spécialement étudié garantissant une utilisation intensive. Cette machine est bien séduisante! Dommage qu’elle se limite au PLA, qui plus est propriétaire. Comment ruiner de bonnes idées par une décision financière de court terme. En espérant une évolution plus ouverte, avec plateau chauffant, nous suivrons la marque avec attention.
La Mark One de chez Bicéphale, encore une imprimante française produite à base de composants européen afin de fiabiliser son fonctionnement
Impossible de citer tous les constructeurs, il s’en crée d’ailleurs au moins un par semaine. Cependant la tendance que j’avais évoquée à plusieurs reprises se confirme: même si on trouve encore d’innombrables modèles directement dérivés du projet RepRap original, des progrès considérables on été faits sur le design des machines: elles sont beaucoup plus fiables et plus simple d’emploi que par le passé. L’entrée de gamme chinoise ou assemblée à partir de pièces chinoises se porte bien car le prix a considérablement baissé. Le calibrage automatique se généralise, les problèmes de warping et de décollement sont jugulés par des innovations bienvenues sur le plateau d’impression, l’électronique est dédiée et conçue en interne, les extrudeurs tiennent dorénavant la route et sont plus facile d’accès. Ultimaker innove en proposant un changement rapide de buse d’impression et je parie que bons nombre de constructeurs vont rapidement leur emboiter le pas.
2016 est une année prometteuse et j’ai hâte de voir l’issue de cette compétition acharnée entre constructeurs.